Il y a tant de façons de décrire Shawn Eades. Son épouse l’aimait tendrement car il était charismatique et fort, et malgré cela il prenait beaucoup de plaisir à faire des chatouilles à ses petites filles et à ramener des chatons à la maison pour qu’ils fassent partie de la famille. Il était gentleman à la manière d’autrefois mais il avait des principes et savait quand affirmer ses convictions. Ses petites filles se souviennent de son grand rire sonore. Shawn était conscient des dangers que sa profession lui faisait courir, et il avait sagement pris des dispositions pour assurer le bien-être de sa famille, « au cas où » – éventualité à laquelle doivent faire face toutes les familles de militaires.

Ses amis et sa famille se souviennent de son engagement dans la Franc-Maçonnerie, dont les idées correspondaient à son approche intègre et sérieuse de la vie. En tant que franc-maçon, Shawn put prendre part à cet esprit de fraternité si essentiel à sa nature, et les rites et cérémonies furent très enrichissants pour lui. C’était un homme de foi mais qui gardait l’esprit ouvert; il brillait dans les conversations portant sur des sujets intellectuels et philosophiques.

En Afghanistan, il était connu pour son travail dur et son bon sens, ne prenant pas de risques inutiles et ne laissant pas les autres en prendre. Les autres soldats connaissaient Shawn comme quelqu’un de discipliné, solide et méthodique – avec un fort esprit de compétition! Ces caractéristiques faisaient partie intégrante de son caractère et se retrouvaient dans ses compétences en jiu-jitsu, dont il était ceinture noire. Toutes ces qualités lui permirent de tenir pendant trois missions en Afghanistan, la première fois peu après 9-11, suivie d’une autre en 2006 et sa dernière en 2008.

Bien qu’il ne se plaignît jamais de la situation là-bas, qu’il n’ait jamais dit ne pas vouloir y aller, qu’il n’ait jamais refusé une tâche, il était cependant choqué par les conditions dans lesquelles se trouvaient les militaires canadiens et le peuple afghan. Tous ses sens étaient submergés : la vue, le toucher, l’odorat, le goût. La chaleur, la pauvreté, la nourriture infecte (ou sa pénurie) – et la continuelle poussière de sable si irritante – lui faisaient cruellement sentir les différences entre nos deux mondes. Tout cela lui faisait considérer comme des biens précieux, les colis de nourriture que sa famille lui envoyait, et qu’il partageait avec les autres.

En tant que technicien senior de neutralisation des explosifs, Shawn, avec son équipe, étaient malheureusement très demandés. Ses camarades ont dit qu’il était un formidable exemple et qu’eux-mêmes « auraient voulu être ce gars ». Le but de Shawn était de faire carrière dans l’armée, et il avait atteint le grade de sergent-major. Après s’être engagé dans les cadets de l’air à l’âge de 12 ans, Shawn comprit qu’il était fait pour la vie militaire. Il avait des aptitudes innées pour être ingénieur, et après une formation de base à la BFC Gagetown, il passa plusieurs années à la BFC Chilliwack, jusqu’à ce que son régiment fût affecté à la BFC d’Edmonton dans les années 90.

Shawn ne reverra jamais plus les prairies et la vie rurale qu’il avait appris à tant aimer pendant son adolescence au Manitoba, cependant il a transmis à ceux qu’il a laissés derrière lui que « le travail passe en premier », et qu’il pensait que des progrès étaient en train de se réaliser petit à petit en Afghanistan et que les Afghans se sentaient un peu plus en sécurité. Les efforts, croyait-il, serviraient à quelque chose – et ne seraient pas entrepris en vain.

Nancy Bateman

Traduction par Walter Zicha Jr.

Portrait par Shairl Honey