La mère de Kevin connaissait l’engouement de son fils pour la vie militaire. Dès son jeune âge, il aimait ses GI Joe, les films de guerre et les documentaires. Il a visité des sites historiques de la première et deuxième guerre mondiale et s’est enrôlé dans les Cadets de la Marine pendant ses études secondaires.

Sa passion pour le domaine militaire ne pouvait se comparer au dévouement sans bornes qu’il témoignait à sa famille, et l’amour qu’il portait à sa mère. Bouffon à ses heures, il lui arrivait de la hisser sur ses épaules et de la promener ainsi partout dans la maison. Il prenait soin de son grand frère, profitait de son congé pour passer du temps avec sa mère et bénéficiait des conseils avisés de son père qui le décrivait comme étant un homme attachant.

Kevin avait un côté espiègle, mais il avait le cœur à la bonne place. Il trouvait son bonheur dans les petites choses du quotidien, détestait le commérage et l’intimidation et mordait à pleine dent dans la vie.

Il ne demeurait jamais en reste d’humour. On le savait capable de décrocher la lune et tout le monde pouffait de rire en sa présence. Le jour avant la remise de son diplôme d’études secondaires, ses amis lui ont rendu la monnaie de sa pièce en lui rasant un sourcil. Sa mère lui a fait une retouche pour la séance de photo. La blague ne s’est pas arrêtée là, ils ont répété le coup juste avant l’obtention de son statut de soldat.

Ce jeune homme remarquable nourrissait plus d’un centre d’intérêt. Il aimait particulièrement jaser avec des personnes du troisième âge et les faire rire. Vers l’âge de 12 ans, il s’était aventuré au bord de la mer sachant très bien qu’il ne devait pas s’y trouver seul. Il avait en tête d’aller à la pêche au capelan pour faire plaisir à une personne âgée qui ne pouvait s’y rendre et capturer ce délice. Kevin savait qu’il pouvait rendre quelqu’un heureux avec juste un petit effort et il s’est employé à le faire.

Il a fait preuve de leadership et de sagesse très tôt dans sa vie. Alors qu’il n’avait que trois ans, Kevin a compris que son frère aîné avait peur de commencer la maternelle. Il a donc décidé de l’accompagner jusqu’à l’école et de rester sur place jusqu’au début des classes. Il lui aurait fait comprendre qu’une demi-journée ce n’était pas long et qu’à l’heure du lunch, il passerait le prendre avec sa mère. Vers l’âge de 13 ans, il a fait preuve d’une grande force morale lorsqu’il a accompagné dans la mort sa grand-mère, en voulant la rassurer, il lui aurait soufflé à l’oreille qu’elle pouvait partir.

Kevin comprenait le rôle qu’il tenait comme militaire : aider les gens et combattre le mal. Il disait : « Si vous êtes témoin du mal et que vous l’ignorez, si vous êtes témoin du mal alors que celui-ci sème le chaos et que vous restez à l’écart, vous serez obligé d’y faire face tôt ou tard. » Kevin a choisi d’y faire face très tôt dans la vie.

Lorsqu’il est arrivé en Afghanistan, son peloton avait pour mission de participer à l’opération Achilles, une initiative qui consistait à sortir les talibans de la province d’Helmand. Peu après son arrivée, La Presse canadienne voulait savoir ce qu’il pensait de l’opération. Sa réponse ne pouvait être plus claire : « On est ici. On s’est entraîné plusieurs années et finalement, on va faire notre travail : on est prêt. »

Kevin comprenait l’importance de son travail. Dans les moments difficiles, son comportement était conforme à sa volonté de changer les choses. Il disait : « les gars, préparez-vous à encaisser ».

Or, même s’il connaissait les tenants et aboutissants de la mission canadienne en Afghanistan, Kevin cherchait aussi à rendre la vie plus facile aux afghans. À la demande de Kevin, sa mère ajoutait des crayons, des livres à colorier et des bonbons dans les colis réconfort qu’elle lui faisait parvenir afin qu’il puisse les distribuer aux enfants du village. En dépit des circonstances difficiles qu’il a connues, Kevin a marqué de son empreinte le quotidien de bien des gens.

Rhonda Kronyk

Traduction par Louise Pariseau

Portrait par Cindy Revell